256 articles avec anthologie

LE MOMENT LE PLUS DOUX...

Publié le par christiane loubier

Le moment le plus doux
fut l'attente du bus, les tables
du petit café étant à l'ombre
des arbres du square où la brise
de mer se coulait insidieusement
et là je bus un café frappé
avant de quitter Gythion, qui ne me réserva
guère que ce plaisir éphémère
- mais n'est-ce pas l'estampille du plaisir ?
 
 
 
Paul de Roux
Allers et retours (Extrait), Gallimard, 2002

LA CERISE DE MONTMORENCY

Publié le par christiane Loubier

 
                               À Pierre et Suzanne
 
    La cerise courte-queue
Qui s’allume autour de Paris
    Fait jubiler mes banlieues
Dans ce chaud printemps défleuri.
    Salut guignes et griottes,
Mes feux aigus de la Saint-Jean,
    Tisons, braises, lumerottes,
Beaux petits fruits intelligents !
    D’aucuns disent : « Je descends
Des Rois, des Croisés, de Saint-Pierre. »
    Moi je porte dans mon sang
Toute une gloire cerisière.
    Ils disent : « Je suis Ceci
Par le Lis, l’Épée ou l’Église. »
    Moi je suis Montmorency,
Montmorency par la cerise.
 
    Mille tailles, mille cueilles
Dans les hauts faits de ma Maison.
    La cerise avec ses feuilles
Peut figurer sur mon blason.
    L’acide des courtes-queues
Brasille et rit sous nos vertus.
    Cueillez, mes aïeules feues,
Tous nos cerisiers sont vendus.
    Ils ne portent pas le deuil
De leurs soigneurs, de leurs cueilleuses.
    Et les voilà tout orgueil
Sur les collines orgueilleuses.
    Adieu, passé rougissant,
Adieu cerise illuminée,
    Aucune main de mon sang
Ne te cueillera cette année.
 
 
 

Lucienne Desnoues

La fraîche, Gallimard , 1958
 
 
 
 

 

 

 

 

 

 

 

Cerises de Montmorency dans leur cerisier
Beauport (Québec)

NOUVELLES DU LINGE

Publié le par christiane loubier

De soif j'ai rincé mon linge et je l'ai tordu
après ça qu'est-ce-que j'ai fait je l'ai pendu
 
grand ouvert sur le pré tout contre l'odeur
du foin debout le blanc comme la couleur
 
en rimes claires offertes aux rafales du vent
fin comme cible et serré comme van
 
je le regarde avec amour à chaque fois
est-ce lui qui se gorge d'air est-ce moi
 
trame à l'attache eau qui vole
le frais du linge a saisi la parole
 
 
 
Ludovic Janvier
La mer à boire, Poésie/Gallimard
 
 
 
 
 

À L'ORÉE DU BOIS...

Publié le par christiane loubier

À l'orée du bois
tout au fond de la verte pâture
un petit monument votif
tout blanc
— mais voilà que ça se lève lentement
que ça s'ébranle
que c'est une vache
et que c'est inexplicablement satisfaisant.
 
 
 
Paul de Roux
Entrevoir, Paysage en trois saisons, Automne

 

 

 

LORSQUE VIENDRA LE PRINTEMPS...

Publié le par christiane loubier

Lorsque viendra le printemps,
si je suis déjà mort,
les fleurs fleuriront de la même manière
et les arbres ne seront pas moins verts qu'au printemps passé.
La réalité n'a pas besoin de moi. [...]

 

 

 

Fernando Pessoa
Poèmes Desassemblés (poésies d'Alberto Caeiro, 16ème poème, extrait)

SANS BRUIT

Publié le par christiane loubier

[...] personne ne te connaît si bien
que la fleur où tu te penches
sans songer que le jardin te regarde [...]
 
 
 
Pierre Perrault
Chouennes (poèmes 1961-1971)
[extrait]

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