Elle est née d’une lumière orpheline
Son cœur a pris froid
Dans la poussière des jours
Chaque heure accroît d’un ton son silence
Ses bras se ferment dans la fatigue de juin
Sur un printemps comme tant d’autres
Christiane Loubier
1486
Selon mon père, il était nécessaire de prévoir ce qui allait arriver, ce qui avait peu de chance d’advenir, ce qui n’arriverait jamais, etc. Il ajoutait qu’il était tout aussi important de se garder de prévoir quoi que ce soit, puis de faire la synthèse de l’ensemble afin de se tenir prêt sans être préparé.
Par bonheur, ma mère aimait la pluie. « Allons plutôt marcher », me disait-elle. Sur son chapeau noir à larges bords rebondissaient violemment les gouttelettes, et se formait autour d’elle un intense brouillard. Malgré tout, ses yeux restaient grands ouverts, comme toujours, et à peine plus humides qu’en temps normal. Nous avancions en forêt à la recherche d’un vent plus fort, de cascades et d’animaux bondissant à travers tout.
J’ai conservé d’elle cette façon d’aborder avec plaisir les endroits impraticables. Quand le ciel s’assombrit, et alors que la plupart des hommes se calfeutrent chez eux, je prends mon chapeau et je vais à la recherche de ces lieux inaccessibles où je serai débordé par des éléments incontrôlables, où se développe l’harmonie entre la folie brute et la sauvagerie, où tout est violence et vitalité chaotique, avec l’espoir d’être anéanti au meilleur moment.
(1486)
Le Marquis de l'Orée
24 juin 2017
http://lemarquisdeloree.blogspot.ca/
LA VIE NE MEURT PAS
Si votre porte parfois
S'entr'ouvre toute seule
C'est l'esprit de son bois
Qui revient vert de feuilles
André Verdet
LES ROSES FLEURISSENT QUAND TU VAS PARTIR...
Les roses fleurissent quand tu vas partir
sur le mur d'en face, après la Pentecôte.
Les langues de feu ne sont pas descendues
ou peut-être sont-elles remontées au ciel
faute d'avoir trouvé où prendre racine
dans ta vie compacte. Il faut la remporter
avec le même sac, donner jour après jour
ce que tu n'as pas su offrir d'un seul coup
et faire en patientant les gestes quotidiens
ouvrir les volets, regarder le bouleau
coiffé par un premier rayon, sans rien sentir
sur la peau du coeur ou dans les cheveux.
On ne peut que voir, attendre et prier
car il n'y a pas de poignée à l'intérieur.
Jean-Pierre Lemaire
Le pays derrière les larmes (Le défaut de l'été).