CHAIR TENDRE
Écuisser l'arbre
Pour voir en double
Le désir d'une chair divisée
Christiane Loubier
Elles accouchent à cheval sur une tombe,
le jour brille un instant, puis c’est la nuit à nouveau.
Samuel Beckett
En attendant Godot
Dans ce bois debout
Sous les grands cyprès
Tu étais l’alphabet
J’étais la hache
Le silence affuté
Pour transformer la blessure
En quelque chose qui dure
Dépouillement du cœur jamais atteint
Les mots en trop ne prouvent rien
La souffrance qui en découle
Encore bien moins
Christiane Loubier
À qui dira-t-il
Comme il aime le lierre
Qu'il en cherche au bois
Une grande épaisseur
Pour hiverner.
Guillevic, Terraqué
Il est juste qu’il neige
Sur nos lèvres cousues
En points de croix
Il aurait fallu le gros fil
L’aiguille et la main agile
Pour tenir assemblés les heures
Les jours et l’envers des jours
Pour comprendre le sens
De cette courtepointe recouvrant le pays
Depuis que nous tenons la lampe
Toutes nos mémoires
N’ont jamais été bien cousues
Autrement nous aurions su
Que cette colère était aussi la nôtre
Nous aurions su
Quelque chose de nous-mêmes
Dont nous cherchions partout
Des traces du jamais su
Qui a fait pleuvoir le soleil
Avec la taciturne fin
Christiane Loubier